La victime émancipée? Fabriquer la victime dans les régimes d’indemnisation des victimes d’actes criminels

Date de la conférence: jeudi 9 février 2023

Depuis quelques décennies, la victime est en quête d’émancipation. Cherchant à s’extirper de l’ascendant du droit criminel, elle trouve tantôt sa voix dans des recours de droit privé. Tantôt, elle s’échappe de la logique transactionnelle en se creusant une place dans le droit social. Chaque fois, pourtant, le droit reprend le contrôle sur la figure de la victime en la fabriquant, en désignant quelles personnes ont le droit ou doivent porter l’étiquette de la victime.

Cette conférence propose se de pencher sur l’un des lieux de cette quête émancipatrice — celui des régimes étatiques d’indemnisation des victimes d’actes criminels — en prenant comme lieu d’investigation le régime québécois, de sa création en 1971 à sa réforme en 2021. Quelle victime y est fabriquée?

Le régime québécois participe au mouvement de plusieurs États occidentaux qui, au cours de la deuxième moitié du 20e siècle, ont mis en place divers régimes publics d’indemnisation des victimes d’actes criminels. Ceux-ci visaient à fournir un soutien financier aux victimes, à leur octroyer une reconnaissance, à les aider à guérir et à reprendre le contrôle de leur vie. À une ère d’expansion des protections et droits offerts aux victimes, ces régimes s’inscrivaient dans une mouvance visant à « recentrer » la victime dans les systèmes de justice, à ne plus en faire un personnage du droit de second ordre.

Il va sans dire, par ces régimes et les discours qui les entourent, l’État mobilise l’idée d’une certaine victime — tout autant qu’il la fabrique. Mais qui, exactement, est cette figure de la victime qui transparait et qui est construite par ces régimes d’indemnisation? Sommes-nous par exemple réellement face à une figure de victime émancipée, qui échappe aux mécanismes traditionnels de la justice pénale et civile qui lui étaient peu favorables pour obtenir reconnaissance et réparation? Sommes-nous plutôt confrontés à victime disciplinée, qui est canalisée vers un certain rôle, une certaine identité, si elle veut espérer obtenir le secours de l’État? C’est ce que cette conférence cherchera à mettre en lumière.

Plus généralement, cette conférence sera également l’occasion de réfléchir sur la catégorie de la pensée juridique qu’est la victime, dans tous les domaines de droit. Le droit a-t-il besoin de la victime comme catégorie de pensée? Peut-il — ou doit-il — s’en émanciper?

 

Jeudi 9 février 2023 12h30 - 14h00 (Montréal) / 18h30 - 20h00 (Paris) par zoom

Lien de la conférence: https://uqam.zoom.us/j/87119239505

Conférencier(e):
Marie-Andrée Plante

Marie-Andrée Plante est candidate au doctorat en droit à l’Université McGill et entrera en fonction à titre de professeure à la Faculté de droit de l’Université de Sherbrooke en juin 2023.

Elle est titulaire d’un double diplôme en droit civil et en common law de l’Université McGill, d’une maîtrise de l’Université d’Oxford ainsi que d’une maîtrise cohabilitée par l’École normale supérieure de Paris, l’École des Hautes Études en Sciences Sociales et l’Université Paris Nanterre. De 2016 à 2017, elle a occupé les fonctions de directrice adjointe du Centre Paul-André Crépeau de droit privé et comparé. Ses intérêts de recherche comprennent la théorie du droit et l’histoire des idées, l’épistémologie et la méthodologie juridiques, les théories féministes du droit, les violences conjugales et sexuelles, le droit animalier et l’éducation juridique.

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